[Infographie] Des exemples pour - enfin - comprendre la prorogation des délais échus pendant l'état d'urgence sanitaire

[Infographie] Des exemples pour - enfin - comprendre la prorogation des délais échus pendant l'état d'urgence sanitaire

29.06.2020

Gestion d'entreprise

Avec le confinement, vous n'avez pas pu faire appel d'un jugement de condamnation en paiement ? Ou activer une clause pénale contractuelle ? Pas d'inquiétude : depuis le 24 juin, les délais recommencent à courir. Quels étaient les cas concernés par la possibilité de prorogation des délais ? Comment calculer le report ? Voici quelques exemples pratiques pour mieux s'y retrouver.

Pour faire face à l’épidémie de Covid-19, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 est venue instaurer un état d’urgence sanitaire, prorogé jusqu’au 10 juillet inclus par la loi du 11 mai 2020. C’est cette base qui a permis au gouvernement de prendre de nombreuses ordonnances pour protéger l’activité économique française. Parmi ces ordonnances, celle relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire permet un report de certains délais pendant une période dite « juridiquement protégée », soit du 12 mars au 23 juin à minuit. Une ordonnance modifiée une première fois le 15 avril (pour l’article 4), puis à nouveau le 20 mai et le 3 juin (art. 2), etc. Bref : difficile de s’y retrouver. Concrètement, qu’est-ce qui change dans la pratique et comment calculer ces délais ?

L’ordonnance est claire sur un point : le report agit sur les délais, mais pas sur les droits, qui ne sont pas affectés par les mesures de prorogation. L’objectif, ici, a été de trouver un équilibre entre l’adoption de mesures nécessaires pour faire face aux difficultés et la poursuite de l’activité : pas question, pour le gouvernement, d’entraîner sa paralysie totale.

Les cas où le report des délais s’applique (articles 2 et 4)

L’article 2 de l’ordonnance, qui concerne les actes, recours, actions en justice, formalités, publication, etc., prescrits par la loi ou le règlement - dont l’échéance devait tomber pendant période juridiquement protégée -, indique qu'ils seront réputés avoir été faits à temps et ne pourront pas, dès lors, être regardés comme tardifs. Car l'inaction ne peut pas être sanctionnée par la nullité, la sanction, la prescription, l'irrecevabilité, etc. Et les délais légaux sont reportés à l’issue la période juridiquement protégée, sans pouvoir aller au-delà du 24 août - soit un nouveau délai de 2 mois maximum -. Voici quelques exemples pratiques.

Délais légaux (article 2)

Vous voulez faire appel d'un jugement de condamnation en paiement et le recours a été interrompu depuis le 12 mars. Voici le temps qu'il vous reste.

Vous souhaitez déclarer une créance vis-à-vis d'une entreprise mise en procédure collective avant la crise. Voici un exemple de délai à respecter.

Vous devez payer votre redevance annuelle auprès de l'Inpi pour conserver votre droit de propriété intelectuelle. Calculez le temps qui vous est compté.

 

Le cas des actes qui ne peuvent être accomplis qu’à partir d’une certaine date

L'article 2 s'applique aux délais d'opposition et de contestation. Par contre, il ne s'applique pas aux actes ou formalités qui peuvent être réalisés à l'expiration de ces délais. En bref : dans ce type de cas, ce ne sont pas les actes qui sont reportés. Les actes ou formalités qui doivent attendre l’expiration d’un certain délai de contestation ou d’opposition peuvent être faits à l’expiration du délai « normal ». Par contre, le bénéficiaire du délai de contestation ou d’opposition peut bénéficier du report.

Exemple : lors d'une opération de réduction de capital - qui n'est possible qu'à l'expiration d'un délai de 20 jours -, la réalisation de l'opération sera possible à l'expiration du délai normal. En revanche, le délai d'opposition bénéficie, lui, du report de l'article 2.

 

Sanctions conctractuelles (article 4)

L’article 4, quant à lui, concerne les sanctions contractuelles, c’est-à-dire les astreintes, clauses pénales et résolutoires. L’idée est de paralyser ces outils qui viennent sanctionner l’inexécution du débiteur : ils sont trop sévères pour être admis dans un tel contexte de crise. Ainsi, la règle à retenir est la suivante : pour les astreintes sanctionnant l’inexécution d’une obligation dans un délai échu entre le 12 mars et le 23 juin à minuit, le report est égal au temps écoulé entre le 12 mars ou la date de naissance de l’obligation, si elle est ultérieure, et la date à laquelle l’obligation aurait dû être exécutée.

A noter : les parties au contrat sont libres d’écarter l’article 4 par des clauses expresses, selon le rapport au Président de la République sur l’ordonnance du 15 avril. C’est d’ailleurs ce que recommande Gaël Chantepie, professeur de droit à l’université de Lille. Comment faire ? Deux possibilités, selon la date de conclusion du contrat :

  • pour les contrats conclus après le 12 mars : recourir à la technique contractuelle classique, donc aux clauses « MAC », de force majeure, etc.
  • pour les contrats conclus avant le 12 mars : c’est possible aussi, via un avenant au contrat.

Attention : toutes les sanctions classiques de l’inexécution du contrat (résolution unilatérale, exception d’inexécution, réduction du prix, etc) ne sont pas visées par l’ordonnance.

Plusieurs cas de figurent se posent. Vous souhaitez, tout d'abord, appliquer une astreinte ayant pris effet avant le 12 mars.

 

Un second cas de figure peut-etre celui de l'astreinte qui aurait du prendre effet pendant la période juridiquement protégée.

Enfin, comment peut-on reporter une astreinte qui peut prendre effet après la période juridiquement protégée ?

Cet exemple est particulier. On aurait pu penser que la situation ne posait aucune difficulté. Mais le législateur a considéré que, à l’exception des sommes d’argent, l’exécution a sans doute été rendue plus difficile pendant l’état d’urgence : un mécanisme de report a donc été prévu, d'une durée égale au temps écoulé entre, d'une part, le 12 mars 2020 ou, si elle est plus tardive, la date à laquelle l'obligation est née et, d'autre part, la fin de cette période.

Les exclusions

Initialement, l'article 2 ne précisait pas si l'ordonnance s'appliquait aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement. L'ordonnance du 15 avril est venue clarifier le champ d'application de l'article : les délais légaux en droit de la consommation, en matière de contrats d'assurance ou de service financier sont exclus. Ainsi, si vous avez souscrit à un crédit à la consommation le 10 mars, la rétractation n'était possible que jusqu'au 24 mars, soit pendant le délai habituel de 14 jours

Pour le paiement de sommes d'argent, là encore, l'obligation restait en place pendant la période juridiquement protégée. En cas d’inexécution, le débiteur pourra verser des intérêts au créancier, qui pouvait recourir aux sanctions légales de l’inexécution. Le débiteur peut y échapper, à condition de prouver que la force majeure est applicable. Autrement dit, le droit commun prend, dans ce cas, le relai de l’ordonnance, mais avec une appréciation au cas par cas.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Olivia Fuentes et Sophie Bridier
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